Comment se créer un espace afin de pouvoir pratiquer la photographie argentique en toute tranquillité ?
Définition du besoin
Même si la pratique de la photographie évolue (beaucoup ?) et que nous avons tendance à accumuler du matériel, il est primordial dans la création d’un labo photo de réaliser au préalable une définition de vos besoins. Que mettre dans cet espace ? Quels sont les outils à ma disposition ou quels sont les outils que j’aimerais avoir. Quelle place je peux occuper, etc …
Dans mon cas, à cet endroit, je dois pouvoir :
- placer un agrandisseur,
- stocker une dizaine de bidons,
- stocker du papier photos de différentes tailles,
- stocker le « petit matériel » comme les pinces, les pinceaux, lampe inactinique, les gants, etc
- placer une jobo CPE2 pour les développements,
- stocker la chimie,
- être à l’abri de la lumière,
- poser au minimum 3 grandes cuves de développement pour les tirages,
- prévoir l’arrivée de l’électricité (ne serait-ce que pour l’éclairage inactinique),
- aérer l’endroit,
- ranger efficacement car l’endroit est partagé pour plusieurs activités.
Petite chose à savoir, cet espace n’a aucun accès à l’eau, tous les développements se feront via des bidons. Il s’agit tout simplement d’un squat d’une partie du garage 😉 Le stockage des pellicules se fait à un autre endroit, là où les écarts de température sont plus stables.
Je vous mets les tarifs (au moment des achats) à titre indicatif afin de vous donner une idée du coût de fabrication. Bien entendu, le but est de s’amuser à bricoler, rien de vous empêche de récupérer des meubles ou du bois et de les adapter au mieux, ce qui peut revenir bien moins cher au final ;).
Disclaimer : Si vous souhaitez créer un espace pour pratiquer l’argentique, n’oubliez pas d’adapter le projet en fonction de l’espace disponible, de vos besoins, de votre pratique et de votre budget. Les méthodes de construction présentées ici ne sont qu’à titre indicatif. Il existe différente manière de faire. Pensez également à récupérer du matériel un peu partout. Dans le cadre de ce tutoriel, j’ai préféré tout acheter afin de faire un tutoriel complet et accessible pour tout le monde.
Matériaux nécessaires :
- 2 tasseaux en sapin 44×57 2m50 : 33,80e
- 12 tasseaux en sapin 27×27 2m : 53,8e
- 3 plateaux en sapin 200×60 : 65,70e
Voici la liste du matériel nécessaire qui n’est pas compris dans le prix puisque je possédais déjà le matériel :
- De quoi couper : scie sauteuse, scie à bois, scie circulaire, scie à onglet, etc
- De quoi visser : visseuse et tournevis
- Vis à bois de différentes tailles,
- Une ponceuse et le papier qui va bien,
- Des serre-joints,
- Un mètre,
- Un crayon,
- Un niveau à bulle,
- Des roulettes donc 2 avec un frein (non obligatoire),
- De l’huile (non obligatoire),
- Colle à bois (non obligatoire),
- Une équerre en métal (non obligatoire),
- Des serre-joints dormants (non obligatoire).
Afin de se faciliter la vie, je suis parti sur un espace de 2m de longueur avec une profondeur de 60cm. Il s’agit pile-poil de la taille des plateaux en sapin. Le but est d’éviter à avoir des découpes supplémentaires en longueur et en largeur avec un risque de ne pas être très droit. De plus, tout le monde n’a pas forcément la possibilité d’avoir tous les outils. Sachez cependant que dans les magasins de bricolage, il est possible de se faire découper des plateaux aux bonnes dimensions sans de frais élevés, même gratuitement.
Côté dimensions, le plateau fera donc 2m de longueur sur 60cm de profondeur. La hauteur sera de 90cm environ. Vous pouvez définir la hauteur nécessaire en vous mettant debout, les bras à 90°C et en mesurant la longueur entre le sol et vos bras. Il s’agira de la hauteur recommandée mais si vous êtes à l’aide avec quelques centimètres en moins ou en plus, n’hésitez pas. Si vous souhaitez calculer plus simplement, vous pouvez prendre votre taille en cm, la diviser par 2 et puis ajouter 5. Par exemple, si vous mesurez 1,80m cela donnera ((180/2)+5)= 95. La hauteur du plan de travail devrait être de 95cm environ. Ceci est bien entendu à titre indicatif !
A l’attaque !
Passons aux choses sérieuses. La première étape va être de réaliser les découpes. Ensuite, cela ne sera que de l’assemblage. Mais AVANT TOUT, protégez-vous. Pour cela, rien de mieux qu’un masque pour les yeux et un casque de chantier pour les oreilles.
Création des cadres
Nous allons créer les cadres de l’établi. Trois cadres identiques qui seront ensuite fixés aux pieds de l’établi. Ces cadres permettront de déposer les plateaux et de supporter le poids du matériel. Le plateau du haut hébergera l’agrandisseur et le matériel pour dévlopper. Les autres plateaux serviront de rangement et de stockage.
Le cadre doit donc faire 2000x600mm. Pour cela, nous allons utiliser les tasseaux de 2m 27×27. Vérifier la longueur des tasseaux tout de même et mettez en 2 de côté. Ensuite, avec un tasseau, il faudra créer 4 tasseaux de 546mm de longueur. Pour le 4ème tasseau, il faudra entamer un second tasseau car la longueur totale des 4 tasseaux va dépasser les 2m.
Refaites bien les mesures avant de couper.
Assembler/Coller les tasseaux pour créer la partie « rectangulaire ». Une fois assemblé/collé, vous pouvez renforcer le tout avec des longues vis. Dans le cas présent, j’ai utilisé une petite fraise de manière à ce que la tête de vis ne soit pas à l’extérieur du bois.
Coller/visser les deux autres tasseaux en essayant de respecter une distance égale.
Comme vous pourrez le voir sur les photos, certains tasseaux ne sont pas totalement à la longueur désirée. Cela m’embêtait de découper de nouveaux tasseaux pour 2 ou 3 cm manquants, qui comme vous pourrez le voir n’empêcheront pas de poser le plateau de manière optimale.
Disclaimer : Même si les dimensions peuvent vous sembler bonnes sur le papier, en pratique cela n’est pas toujours le cas. Les magasins de bricolage ne fournissent pas totalement des planches et des tasseaux aux bonnes dimensions et en bon état. Les planches ne sont pas toujours droites et pas très bien rabotées. Vous pourrez donc avoir des surprises (et j’en ai eu !). Par ailleurs, il ne faut pas oublier que le bois brut (c’est-à-dire sans x couches de vernis) « travaille » en fonction des saisons et des températures. Il peut se déformer légèrement par exemple.
Les pieds
Pour installer les pieds, nous allons mettre le cadre au sol. Les tasseaux 44×57 sont taillés sur des longueurs de 80 cm. Visser va être la principale action, tout en vérifiant que les pieds soient bien droits. Ceci dit, votre sol peut ne pas être totalement droit non plus ;). On fixe et on visse.
Les étapes seront les mêmes pour les autres cadres à fixer sur les pieds.
Petit rappel, la colle n’est pas obligatoire du tout. Elle n’est pas nécessaire. C’est en fonction de vous et sur le long terme, pourrait vous empêcher d’adapter l’établi.
Renforcement du cadre
Des tasseaux perpendiculaires ont été ajoutés afin de supporter le poids des planches, garantir un plan « plat » et améliorer la robustesse de l’établi. Serre-joints + vis seront des atouts précieux.
Mise en place des plateaux
Un peu de découpage sera à faire notamment, pour l’étage du bas et l’intermédiaire. Prenez les bonnes mesures et adaptez selon le besoin. Un montage à blanc sera nécessaire afin de passer à l’assemblage final.
Pour ce dernier, rien de fou, on visse les plateaux sur tout le long des tasseaux. Vissage, fraisage, vissage, fraisage, etc … vous commencez à comprendre le principe.
Les tasseaux verticaux servent à renforcer la structure et à délimiter tout ce qui va être posé par la suite.
Les planches et tasseaux sont bruts. Alors un petit coup de ponçage pour que cela soit doux au toucher n’est pas un luxe. Et puis les échardes, ça fait mal.
Je suis resté sur du simple, ponçage au grain 120 puis 240. On peut faire plus mais comme il va se prendre des coups et des éclaboussures de produits de développement, aller plus loin ne me paraissait pas nécessaire. A vous de voir.
Résultat quasi-final
Tada !!!
Pour l’égo, on regarde si tout est bien droit :
Petit conseil, une fois installé, ne le remplissez pas de suite. Attendez un peu quelques heures, voir une journée ou deux. Déjà parce que cela demande presque autant de temps que de fabriquer l’établi et surtout le temps que le bois » s’habitue » aux températures de la pièce.
Et ensuite ?
Voyons ce que cela peut donner une fois (presque) tout installé.
En fait, il se trouve que nous possédions plus de matériel que prévu surtout que nous sommes deux à pratiquer l’argentique à la maison avec chacun nos habitudes. Des étagères murales ont été ajoutées.
Je privilégie les objets plus légers sur les étagères même si elles peuvent supporter un poids assez conséquents.
Les améliorations possibles
Comment ça ? On doit déjà améliorer alors qu’il est tout juste terminé ? Non bien entendu mais voici les éléments qui seront améliorer au fil du temps :
- Ajouter des roulettes afin que l’établi puisse être mobile en cas d’un changement dans la pièce. L’établi est lourd à vide, alors imaginez ce que cela peut donner avec tout le matériel installé.
- Accrochage d’une (multi)prise murale afin d’accéder facilement aux branchements : bouilloire, jobo, éclairage inactinique, tablette, lampe UV,
- S’intéresser à un éclairage de type bande LED pour éclairer en rouge sur toute la longueur de l’établi,
- Huiler/Cirer l’établi pour le protéger du mieux possible,
- Accrocher un système permettant de faire sécher les pellicules en toute sécurité.
Conclusion
J’espère que ce DIY pourra vous donner des idées afin d’aménager un espace dédié. Celui-ci fait moins de 2m². Les améliorations seront apportées au fur et à mesure des utilisations et des habitudes de travail. Pour le moment, il ne s’agit que de la partie « humide », d’ici quelques temps, je partagerai la partie plus « numérique » du traitement des images en évoquant notamment le stockage des négatifs, le rangement, etc …
N’oubliez pas une chose, il ne s’agit pas d’un meuble fait par un menuisier mais d’un bricolage sur-mesure. Rien n’est parfait et cela n’était pas le but.
Et de votre côté, comment travaillez-vous la photo argentique ?
A bientôt
Rémy,
Karine StradaBoxCamera
Super … c’est simple et en même temps bien pensé ⭐️
ROCHE Yza
Bonjour Rémy e merci pour ce tutoriel détaillé. Mais au fait.. quid d’un système de séchage pour les tirages barytés au sortir de la laveuse ?
Personnellement, j’ai la chance d’avoir accès à un super labo dans le cadre d’une inscription à un cours dispensé dans un centre Paris Anim’ de la Ligue de l’enseignement. Super bien équipé, avec deux profs pour veiller à l’entretien du matériel, enrichir celui déjà existant et bricoler à l’huile de coude maquillettes, cartons troués et autres petites choses qui aident au tirage. Mais c’est un lieu collectif, et l’accès en solo est possible seulement de manière très restreinte (et d’autant plus restreinte que cette saison, la demande a explosé). Comme je dispose déjà d’un certain matériel (notamment un petit agrandisseur, des cuvettes pour tirer jusqu’au 24×30) je songe à aménager mon labo dans ma maison de campagne. Mais je suis nulle en bricolage, quant aux connaissances « mécaniques » de mon engin, c’est aussi le zéro presque absolu… alors pour le moment, je profite autant que je peux d’un labo « top » et géré par des pros! Il n’empêche que ton article est assez inspirant…
Bonne année 2024 et longue vie à Dans ta cuve!
Yza R.
Rémy
Bonjour Yza,
Merci pour ton commentaire. Effectivement, il n’y a pas de système de séchage pour les tirages barytés car je n’en fait pas encore. Je fais très peu de tirage, surtout en ce moment par manque de temps surtout.
Je rajouterai des éléments au fur et à mesure sur l’article, notamment le séchage des pellicules que je dois perfectionner dans un endroit comme celui-là.
Bonne année 2024 !
Gérard D.
Bonjour,
Belle réalisation. Avec de bonnes idées afin d’optimiser cet espace consacré à notre passion.
Pour les plans de travail, on trouve des planches recouvertes en mélaminé vendues pour la confection d’étagère. C’est pas trop cher.
Cela peut remplacer avantageusement les planches en bois brut, afin de faciliter l’entretien.
Un grand merci pour ce partage !!
Rémy
Bonjour,
Merci. On peut récupérer tout plein de trucs mais j’ai décidé de le faire avec des matériaux que l’on peut trouver facilement. L’idéal « presque » serait même de trouver des plans de travail de cuisine. Cela peut se récupérer et se bricoler, même si un peu lourd à manipuler seul(e).
On peut même y rajouter du vernis sur le bois brut pour le protéger 😉
Régis
Bonjour et bonne année 2024 !
Félicitation Rémy, c’est du super boulot (coin tirage et tuto) et merci pour ce partage d’expérience !
Attention toutefois : la poussière est l’ennemi n°1 dans le labo argentique ! Et là, tu es dans le garage qui est loin d’en être exempt. Tout ton matériel devrait être protégé, à commencer par l’agrandisseur (prévoir une housse, un simple sac poubelle de grande taille peut faire l’affaire), son plateau, le margeur, etc. Et comme tu as du matériel stocké au dessus de ta zone humide, attention à ce que de la poussière n’en tombe pas lors des séances de tirage (une fois la poussière collée au tirage, c’est compliqué à retirer sans dommage).
Pour ce qui est d’ajouter un bandeau de LED pour l’éclairage inactinique, une fois le bon bandeau trouvé (il en existe des versions étanches), il faudra faire des tests pour éviter que cela n’illumine pas trop. Et, si possible, coupler cet éclairage au compte-pose pour qu’il s’éteigne quand l’agrandisseur est allumé pour éviter qu’il y ait une influence sur le temps d’exposition.
Pour la protection de ton établi, le révélateur et le fixateur tâchent beaucoup, le plus simple et le moins coûteux serait d’en recouvrir la surface avec un film plastique qui sert à recouvrir les livres. Cela évitera que ça s’incruste dans les fibres du bois. C’est moins joli qu’actuellement, mais ça protège à moindre coût. Une toile cirée fait aussi l’affaire pour un look vintage années 70, mais c’est beaucoup plus onéreux (environ 15€ le mètre linéaire, voire plus).
Une cabine de séchage des films (indispensable pour se prémunir de la poussière du garage), c’est une option coûteuse en terme d’espace (le prix s’oublie), mais est-ce nécessaire ? La cabine de douche fait aussi bien, ne craint pas les gouttes d’eau. Par exemple, une simple tringle posée en travers des parois vitrée fait l’affaire, et c’est une solution amovible.
A part ça, ta liste évoque une JOBO CPE2. Je ne connais rien au développement en rotation continue. Il me semble qu’il faut raccourcir le temps du révélateur, mais de combien ? Et est-ce que tous les révélateurs sont compatibles ou y en a-t-il à privilégier ? Si tu as le temps et des connaissance en ce domaine, un article serait appréciable pour la communauté, AMHA…
Rémy
Bonjour Régis,
Merci pour tous tes ajouts. Cela est très intéressant d’avoir des retours. Avant, tout était fait en salle de bain 😉 Pour le coup,fabriquer une cabine de séchage pourrait être un très chouette projet 😉
Pour la JOBO, effectivement, tout est compatible, surtout que celle-ci n’est pas très sophistiquée. Elle fait la rotation à ta place. En général, je développe en enlevant 10% de temps habituel et cela donne de bons résultats. Je me note un article sur l’utilisation d’une JOBO.